Le développement durable d’Alain Mallart

Après Novalliance, il se relance dans l’énergie verte
Le développement durable d’Alain Mallart

Source : Entreprendre – Mensuel N°229 Avril 2009

Il est cultivé et terriblement ambitieux. Victime indirecte du CDR, Alain Mallart, l’ex-patron vedette du groupe Novalliance repart vers de nouveaux défis.

Il pose lui-même la question : «Comment rester utile quand on a vendu son groupe, qu’il est vital pour soi d’entreprendre, que l’on souhaite exercer sa créativité et canaliser son énergie ?» et de répondre aussitôt : «Il n’y a rien de plus exaltant que de réunir des hommes et d’œuvrer ensemble. Alors j’ai choisi de devenir business angel». Autrement dit, d’investir à titre personnel, dans les projets d’entreprise et de «participer avec bonheur à la concrétisation de lancements dont, à l’évidence, notre société a besoin socialement et économiquement».

Un parcours étonnant

Très tôt, Alain Mallart se lance en tant qu’entrepreneur dans le recyclage des déchets industriels et miniers, activité dont il restera dirigeant après la vente de celle-ci à une filiale du groupe Schneider en 1974, puis au groupe de Compagnie Française des Ferrailles (CFF) en 1980. Quelques années plus tard, c’est le début de l’épopée Novalliance, qui deviendra un des premiers groupes de logistique terrestre en France, propriétaire notamment des 400.000 mètres carrés de Garonor en région parisienne. C’est l’époque de la gloire médiatique, aux côtés des autres jeunes représentants de ce nouveau capitalisme français, dans cette période qu’on appelle aujourd’hui «les années Mitterrand».

Des entrepreneurs qu’une journaliste inspirée, Christine Kerdellant, baptise les «nouveaux condottieres», en référence aux chefs de soldats mercenaires dans l’Italie du Moyen-Age. Pour Alain Mallart, cette première aventure durera jusqu’en 1995, date à laquelle il vend le groupe Novalliance, qui réalise un chiffre d’affaires de plus 6 milliards de francs, mais est fortement endetté, notamment auprès du fameux CDR, filiale du Crédit Lyonnais. Des relations qui, quelques années plus tard, vaudront à Alain Mallart d’être mêlé à l’affaire Exécutive Life, ce qui ne lui a pas laissé de très bons souvenirs.

La fin de la traversée du désert

Pour l’anecdote, ses démêlés interminables avec le CDR sont clos, comme en atteste une lettre du président de cet organisme du 19 décembre 2006 concluant : «Nous venons de mettre fin aux différends résultant en définitive de malentendus qui nous opposaient au sujet de la gestion du groupe Novalliance et de sa cession au CDR (…)» . Idem avec le fisc français et une mise en examen sur des opérations passées avec le Crédit Lyonnais entre 1992 et 1994. Cette mise en examen en 1999 s’est soldée le 18 février 2007 par un non-lieu.


En 1999, le CDR avait cru qu’Alain Mallart était le délateur de l’affaire Exécutive Life, alors qu’il n’était, en fait, qu’un investisseur irrépro­chable. Il a dû se défendre aux États-Unis, à la fois au pénal et au civil, a plaidé non coupable et n’a pas été poursuivi. Un tribunal arbitral, présidé par le doyen Cathala, a condamné François Pinault à lui rembourser tous ses frais de défense aux États-Unis.

Philosophe, Alain Mallart constate aujourd’hui : «Quand on est un chef d’entreprise aussi actif que je l’ai été, il n’est pas vraiment surprenant qu’on soit l’objet d’at­taques et de suspicions même s’il est parfois pénible d’être perçu comme sentant le soufre, alors que l’on a toujours été clean». Finalement, ajoute-t-il dans un sourire, «les désertions et défections d’amis et de rela­tions ont été très rares».

Nouveau départ

Pour redémarrer, Alain Mallart aide une petite équipe à créer la société informatique GFI dont il possédera 75% du capital. Cette SSII, qu’il quitte en 1999, réalise aujourd’hui un chiffre d’affaires de 768 millions d’euros. A l’époque, Alain Mallart, rejoint par Françoise Macq, constitue alors en Belgique une première holding, Externalis, pour soutenir financièrement les projets de créateurs dans les domaines d’activité où son expérience passée est utile.

ojirel-entreprendre.jpg«L’idée de départ était de mettre en place une structure artisanale et amicale pour prolonger mes activités de business angel, c’est-à-dire d’investissement à titre personnel. Mais la société a rapidement été amenée, avec la croissance des participations, à se professionnaliser pour se positionner comme une véritable entreprise de capital-risque, en conservant une équipe de taille réduite et une totale indépendance vis-à-vis des institutions financières». Externalis détient des participations dans des secteurs divers comme la technologie et l’informatique, les services aux entreprises, et quelques projets immobiliers très ciblés.

Une longue relation de partenariat depuis 1987 dans la propreté et la gestion des aéroports amène le groupe Suez à proposer à Alain Mallart et ses associés de participer à 50/50 et de manager le développement de son pôle déchets dans l’océan Indien, de Dubai à l’Afrique du Sud en passant par Maurice, La Réunion et les Seychelles. La cession programmée de ces activités donne à Alain Mallard l’envie de créer un nouveau projet qui le ramène à ses amours «d’écolo-capitaliste».

Un groupe dans les Cleantechs

Alain Mallart a rassemblé sous le nom d’Energipole l’ensemble de ses participations dans le domaine de l’énergie, des déchets et de la propreté et instauré des partenariats avec de grands groupes industriels. Plusieurs filiales ont été constituées pour regrouper des participations dans des sociétés implantées en Belgique, à La Réunion, en Guadeloupe, en Afrique du Sud et en France. Les activités de ces sociétés présentent la caractéristique commune de nécessiter d’importantes mobilisations de fonds, avec des engagements à long terme, de vingt à vingt-cinq ans, assortis de prix garantis.

Le groupe s’attache à sélectionner des implantations où les besoins en matière de gestion de déchets sont pressants et où les taux d’ensoleillement sont excellents, puis à valoriser la synergie des métiers abordés. Ainsi, avec le concours de Suez et Séchilienne, Power Alliance, filiale d’Energipole à La Réunion, a réalisé une première mondiale en 2007 de couverture de la décharge de la commune Sainte-Suzanne par panneaux photovoltaiques et exploitation de biogaz. Le groupe s’intéresse également à de nombreux projets, tant dans la biomasse que pour le traitement du méthane. Personne n’arrêtera jamais Alain Mallart.

Pascal Rosier

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