« La théorie française a tué toute discussion sur la peinture »

« La théorie française a tué toute discussion sur la peinture »

Dans La Libre Belgique

par CLAUDE LORENT, Publié le 

Entretien avec Barbara Rose

Ce sera à n’en pas douter un des événements de la rentrée artistique, en septembre prochain. En remettant les pendules a l’heure de la peinture , il créera la polémique autant qu’il décillera les regards formates par le coup de poker de Marcel Duchamp voici plus de cent ans, par l’imposition du conceptuel au milieu des années soixante et par la postmodernité née des la décennie suivante.

Farouchement rejetée

Alors qu’elle n’a jamais cesse d’être active et inventive, la peinture fut farouchement rejetée par les tenants et les porte-parole de ces trois mouvances. Face a une domination concertée, le contrat passe a l’égard de la peinture, a quelques exceptions près qui confirment la volonté de nuire , l’a volontairement marginalisée alors qu’elle continuait a tenir son rang en voie parallèle aux autres expressions.

Franchement de retour sur le devant de la scène, elle éprouve encore du mal à être reconnue pour elle même. Dans ce contexte peu engageant, Roberto Polo, galeriste a Bruxelles et historien de l’art forme aux Etats-Unis, a donne carte blanche a Barbara Rose, éminente personnalité du monde artistique depuis les années soixante.

Une expo qui fera date

L’Américaine porte un jugement très sévère sur le rejet de la peinture et cible sans ménagement quelques responsables. Avec le soutien de la Ville de Bruxelles elle a mis sur pied une double exposition qui fera date.

Elle y célèbre la peinture belge et américaine dans ce qu’elle a de plus singulier et de plus fondamental. En créant l’évènement, elle force a la réflexion et à la prise en compte d’une réalité trop longtemps occultée.

« Il est temps d’en finir « 

-En historienne, Barbara Rose examine la marche de l’art depuis les premières mises en cause de la peinture et à travers le rôle joue par la figure tutélaire de Marcel Duchamp. « On oublie souvent que Marcel Duchamp ne fut pas seulement l’auteur des ready-made et qu’il fut aussi marchand, soutenant des artistes comme Brancusi et créant des collections en tant que conseiller, tant pour le Moma de New York que pour Peggy Guggenheim. Son influence fut déterminante. Il voulait changer les règles, et il l’a fait en imposant sa ‘Fontaine’.

Son exposition au Centre Pompidou a montré qu’il y avait clairement un problème avec la peinture et que pour lui, la peinture ne pouvait plus avoir de place ! »

En mort critique depuis les années 60

L’idée a fait son chemin et malgré les Picasso, Matisse, Miro et autres très grands de la peinture, elle a gagne du terrain avant d’être déclarée morte autour des années soixante. « C’est la théorie française qui a tué toute discussion sur la peinture, déclare l’historienne. Heureusement aujourd’hui aux Etats-Unis, c’est enfin démode, mais le blabla des Lacan, Lyotard, des maoïstes et autres Sollers ou Deleuze et Guattari à consommé tragiquement la rupture. »

Et la commissaire de considérer que plongés aujourd’hui dans « la postmoderne numérique t technologiques qui recycle et ressasse les images, on se trouve dans la même situation décadente qu’a la fin des XVIII et XIX’ siècles et que ça suffit de s’extasier sur un bout de bois ou de la poussière »

Quant au rôle prédominant du critique américain Clément Green berg, grand défenseur de l’abstraction picturale expressionniste, elle nuance : « Il défendait la surface picturale et l’impact rétinien mais rejetait la touche qui fait la grande peinture! Apres les grands drippings de Pollock la question était : que fait-on maintenant? La réponse ne vint pas et Pollock était dans l’impasse. Greenberg a décrété par exemple, que Jasper Johns n’était pas un peintre majeur! Du coup, les vrais peintres se sont renfermes dans leurs ateliers. »

Barbara Rose a donc pris son bâton de pèlerin vers les ateliers.

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